La terrible journée du 16 octobre 1917

Sous les bombardements : une intervention chirurgicale dans les abris de l'hôpital civil, Nancy

Sous les bombardements : une intervention chirurgicale dans les abris de l’hôpital civil, Nancy
Source : Les hospices civils de Nancy pendant la guerre, Marcel Gauguery

Cet extrait du livre Les hospices civils de Nancy pendant la guerre, de Marcel Gauguery, relate les terribles effets des bombardements, tels que les médecins, chirurgiens et infirmiers nancéiens les ont vécus. Un témoignage poignant du dévouement et de l’abnégation de ces hommes et femmes, qui ont parfois fait le sacrifice de leur vie pour protéger les innocents.


La journée du 1er janvier 1917 fut, pour les Nancéiens, un jour d’appréhension très justifiée. Chacun avait encore trop présente à la mémoire la désagréable surprise du 1er janvier de l’année écoulée. On était bien habitué aux gros bombardements, et ce n’était pas l’arrivée de quelques obus que la population craignait ; mais quelques tours des Boches n’étaient-ils pas plutôt à redouter ? D’autre part, le bruit avait couru que la grosse Bertha n’était plus seule à pouvoir tirer sur Nancy, les Allemands devant avoir installé plusieurs pièces similaires capables d’atteindre la ville. La nouvelle n’était cependant pas tout à fait erronée ; mais, pour être dans la vérité, il faut ajouter que la pièce qui tira sur Frouard ne tira pas sur Nancy, et que celle qui tira sur Lunéville était, a-t-on dit, la même que celle qui nous bombardait.

L’année 1917 vit d’ailleurs finir les bombardements par pièce à longue portée, dont le dernier eut lieu le 16 février. En revanche, les bombardements par avions devinrent encore plus violents et meurtriers. Nos ennemis adoptèrent de nouveaux engins tout à fait désastreux, capables de détruire un immeuble de fond en comble.

Aux bombes, ils joignirent des torpilles de dimensions variables, pesant jusqu’à 300 kilos environ. De tous les bombardements par avions de l’année 1917, le plus terrible et le plus néfaste fut certainement celui du 16 octobre. Plus de 80 bombes ou torpilles furent lancées sur la ville. En gare Saint-Jean, un train en partance pour Pont-Saint-Vincent fut particulièrement touché, et l’on se rappelle que ce seul bombardement causa près de 100 blessés ou morts. Ce fut une nuit bien terrible pour les Nancéiens, mais aussi bien pénible pour nos hôpitaux, où toutes les victimes furent amenées. Il est difficile de se rendre compte de l’effort qu’il fallut donner pour recevoir, nettoyer, opérer et panser près de 100 blessés, très gravement atteints pour la plupart, sans compter toutes les familles affolées qu’il fallait recevoir et renseigner, sans même souvent pouvoir être sûr de l’identification hâtive des blessés ou des morts à laquelle il avait fallu procéder. Cependant, ce bombardement, commencé à 6 heures et demie, était terminé vers 10 heures et les blessés qui commencèrent à nous être amenés dès 7 heures, étaient tous dans leur lit pour le lendemain matin 2 heures, grâce aux prodiges de dévouement accomplis par notre corps médical, nos Sœurs et notre personnel infirmier.

Malheureusement, les morts étaient nombreux, et nous eûmes le bien triste spectacle de voir, au cours de cette nuit tragique, 34 familles frappées par des deuils venir pleurer les êtres chers auprès de leur dépouille en lambeaux.

Ce spectacle bien triste et bien navrant ne fut, hélas ! pas le seul qui se déroula sous nos yeux, car les bombardements de 1917 nous en ramenèrent souvent la vue !

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