Construction de tranchées et de fortification passagère

execution tranchée par deux tirailleurs

Beaucoup se posent la question de comment ont été creusées les tranchées sur le champs de bataille. Cet extrait du « Manuel de connaissances militaires » de 1888 apporte ici des éléments de réponse.

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§ III. — Des diverses sortes de Retranchements à employer en fortification passagère pour couvrir les troupes.

253.—Les retranchements de diverses sortes, employés en raison du but que l’on se propose d’atteindre, ainsi que du temps et des moyens d’action dont on dispose, peuvent se grouper sous les quatre titres suivants :
1° Retranchements improvisés.
2° Retranchements rapides.
3° Retranchements progressifs.
4° Retranchements à plusieurs étages de feu.

1° Retranchements improvisés.
(Embuscade pour tirailleurs debout ou couchés. — Tranchée-abri réglementaire et perfectionnée. — Retranchement expéditif réglementaire et perfectionné).

254. — Ainsi que leur nom l’indique, ces retranchements sont improvisés à proximité de l’ennemi, peu avant ou même pendant la lutte, en un temps très-court, et habituellement l’aide des seuls outils que les corps de troupe ont leur disposition. Dans de pareilles conditions, on ne peut plus obtenir une épaisseur de parapet suffisante pour résister à l’artillerie ; dans la majorité des cas, on devra, en outre, se réserver la possibilité de reprendre l’offensive : le fossé extérieur sera donc supprimé ; on se contentera de créer de simples abris strictement à l’épreuve de la balle, et dont la qualité essentielle devra être la rapidité d’exécution, car ces retranchements improvisés pourront se développer sur des étendues considérables.

255. — EMBUSCADE POUR TIRAILLEURS COUCHES (Fig. 10)
On réserve sur le sol un espace de 0m,30 de largeur, sur lequel le tireur s’accoude et en arrière duquel on creuse le terrain en pente sur une largeur de 1m30, de façon à obtenir 0m30 de profondeur en A au fond de la tranchée, là où seraient les pieds du tireur ; on donne au bourrelet de terre de 0m25 à 0m30 de hauteur, et 0m50 d’épaisseur. Trois hommes, munis de deux pelles et d’une pioche, exécutent une embuscade de ce genre, sur un développement de 2m60 (2 longueurs de pelles) en 12 à 15 minutes.
« Cet abri de tirailleur, d’une exécution très rapide, se dissimule parfaitement, couvre bien contre les balles les tireurs couchés en arrière. Il est d’autre part assez peu important pour que les défenseurs n’éprouvent aucune hésitation à le quitter et à se porter en avant. » (Travaux de campagne).

256 — EMBUSCADE POUR DEUX TIRAILLEURS OU SENTINELLES DEBOUT.
Cette embuscade s’emploie lorsque les hommes envoyés en tirailleurs ou les sentinelles doivent, malgré l’intensité du feu, occuper une position pendant un certain temps ; les Russes en ont fait un fréquent usage devant Sébastopol et devant Plewna. — Les deux hommes, munis l’un d’une pelle et l’autre d’une pioche, commencent par s’enfoncer le plus rapidement possible en jetant les terres en avant, ainsi qu’à droite et à gauche, afin d’obtenir des « retours » qui les préservent contre les feux de flanc (Fig. 44). Une fois abrités, ils taillent grossièrement sur le revers un escalier permettant de se retirer rapidement en cas d’attaque et donnent un peu de pente au fond du fosse pour assurer l’écoulement des eaux ; la tranchée doit avoir 0m80 de profondeur et 0m50 à 0m80 de largeur au fond, de façon obtenir un bourrelet de terre de 0m50 de hauteur et d’épaisseur ; la longueur est calculée à raison d’un développement de 0m80 de crête par tireur. Deux hommes peuvent s’abriter sommairement, en 20 minutes, et achever en une demi-heure le trou qui leur servira d’embuscade.

257. —Tranchée-abri réglementaire (Fig. 42). —Pour l’établir, on creuse une tranchée ayant une profondeur de 0m50, une largeur de 1m30 en haut et de 1m10 au fond. Les terres sont rejetées en avant pour former un parapet ayant 0m60 de hauteur au-dessus du sol, et de 0m50 à 0m60 d’épaisseur au sommet ; les terres prenant leur inclinaison naturelle d’environ 1/1 sur les talus intérieur et extérieur, le parapet aura à sa base une épaisseur d’environ 1m70. Le parapet est séparé du fossé par une petite berme de 0m30 à 0m40 de largeur, formant un gradin de franchissement.
Les hommes qui ne tirent pas sont assis dans la tranchée, en se tenant le plus près possible de la masse couvrante. Les tireurs du premier rang s’asseyent sur la berme, en y appuyant la cuisse gauche, et donnent à leur fusil des appuis d’une hauteur convenable, en plaçant devant eux quelques mottes de terre. La tranchée est assez large pour que, dans ces conditions, le deuxième rang puisse s’y loger et, s’il est nécessaire, faire feu debout. La berme, faisant escalier, permet de sortir rapidement de la tranchée pour prendre l’offensive. Ces abris ne sont pas continus ; leur tracé est déterminé par celui de la ligne de bataille même ; ils présentent de distance en distance des trouées de 23 à 30 mètres, servant de débouchés et facilitant le passage de l’artillerie ou de la cavalerie ; les extrémités de chaque bout de tranchée sont légèrement infléchies en dedans pour donner des feux croisés en avant des intervalles.

258. — EXÉCUTION DU TRAVAIL. — Un officier, aidé d’un sous-officier, place des jalonneurs à 10, 20 ou 30 mètres de distance les uns des autres sur la ligne MN (Fig. 12), qui limite la tranchée du côté de l’ennemi… ; puis, s’il en a le temps, il fait rapidement amorcer par deux rainures à la pioche les bords MN et RS de la tranchée, espacés de 1m30 (longueur de la pelle). — Pendant ce temps les travailleurs, réunis autant que possible dans un endroit abrité, reçoivent, s’il y a lieu, un complément d’outils et sont répartis en colonne par un, de telle sorte que le premier homme ait une pioche, que les deux suivants aient chacun une pelle, et, ainsi de suite, chaque groupe de trois bommes se composant d’un piocheur et de deux pelleteurs. Les travailleurs, se suivant de la sorte en file indienne, se développent le long du bord MN de la tranchée et couchent leurs outils sur la rainure, les pelles bout à bout et le fer de la pioche sur le mème alignement (Fig. 13) ; 2 pelles et 1 pioche, ainsi disposées, occupent une longueur de 3 mètres, correspondant à la tâche d’un atelier de trois hommes. Les hommes déposent leur fusil et leur sac à proximité et en arrière ; chaque piocheur marque tout d’abord avec des rainures les quatre côtés du rectangle ABCD, à fouiller par l’atelier ; on se met immédiatement au travail, en ayant soin d’augmenter simultanément l’épaisseur et la hauteur de la masse couvrante, afin d’obtenir en très peu de temps un abri déjà utilisable en cas d’attaque soudaine. Un parapet inachevé de 0m40 seulement de relief, obtenu en une douzaine de minutes, par une excavation de 0m25 de profondeur, donne une masse couvrante qui a 0m65 de hauteur totale et qui peut garantir des tirailleurs placés à genou dans la tranchée. Les piocheurs s’enfoncent, aussi à pic que possible, le long des rainures limitant le déblai, en commençant le travail du côté de la berme MN ; quand la terre est légère, ils ont peu de chose à faire et doivent changer de temps en temps d’outil avec l’un des pelleteurs.

259. — TEMPS ET NOMBRE DE TRAVAILLEURS NÉCESSAIRES. — Avec les gros outils, pelles et pioches du modèle des parcs, la tranchée peut être construite par des hommes exercés en 25 ou 30 minutes dans des terres ordinaires, en 35 minutes dans des terres fortes ; il faut compter en outre une dizaine de minutes pour les dispositions préparatoires et pour le tracé. Trois hommes exécutant ainsi un morceau de tranchée de 3 mètres susceptible d’abriter neuf nommes, on peut admettre, comme donnée moyenne, qu’une troupe s’abrite en une demi-heure, en faisant travailler le tiers de son effectif.
Si, au lieu d’être munis de gros outils, les travailleurs ne disposent que de bèches et de pioches portatives du modèle d’infanterie, le travail sera ralenti et l’exécution de la tranchée-abri exigera de 3/4 d’heure à une heure ; dans ce cas on pourrait gagner près d’un quart d’heure en ne donnant à chaque atelier de 3 hommes qu’une tâche de 2m10 au lieu de 3 mètres ; dans ces conditions, une troupe pourrait s’abriter en 40 à 45 minutes, en faisant travailler la moitié de son effectif.
« Avec les 435 gros outils de terrassiers d’un régiment d’infanterie (mulets et voitures), 2 compagnies donnant 435 travailleurs peuvent exécuter environ 430 mètres de tranchée-abri en une demi-heure. Avec les 915 outils de terrassier d’un régiment d’infanterie (pelles, pioches et bèches), un bataillon de 915 travailleurs pourrait faire en une heure environ 1350 mètres de tranchée-abri » (Travaux de campagne).

260. — Si l’on veut se rendre compte de ce que peut faire une compagnie livrée à elle-même, on voit que cette compagnie dispose de : 40 outils portatifs de terrassier (32 bêches et 8 pioches plus 30 gros outils de terrassier portés par l’animal de bât (18 pelles, 42 pioches).
On peut donc obtenir : 1° 8 ateliers dont chacun est muni de 2 bêches et d’une pioche, et peut faire 2m10 de tranchée…, soit 16m80 pour 8 ateliers ;
2° 4 ateliers, dont chacun est muni de 3 bêches et peut faire 2m10 de tranchées, soit 8m40 pour les 4 ateliers ;
3° 9 ateliers, dont chacun est muni de 2 grosses pelles et d’une grosse pioche, et peut faire 3 mètres de tranchée, soit 27 mètres pour les 9 ateliers ;
4° 2 ateliers, dont chacun est muni de 2 bêches portatives (reliquat du chiffre 32) et d’une grosse pioche (reliquat du chiffre 12), chacun de ces ateliers peut faire 2m10 de tranchée, soit 4m40 pour les 2 ateliers, soit au total 56m5,60 ou 60 mètres environ en chiffres ronds.

En faisant travailler 69 hommes, on pourra donc obtenir, en un temps variable de 30 à 45 minutes environ, 60 mètres de tranchée susceptibles d’abriter environ 450 hommes placés sur deux rangs, à raison de 0m80 par file.
Dans la pratique, les 40 outils portatifs de terrassier attribués à une compagnie sont répartis entre les sections, à raison de 10 par section. Une section étant en tirailleurs, ses hommes emploieraient, s’il y a lieu, les outils pour s’aménager de suite trois ou quatre embuscades de tirailleurs. La section placée en renfort pourra, s’il y a lieu, avec ses 10 outils portatifs, faire travailler 3 ateliers seulement et obtenir environ 7 mètres de tranchée.
Les 2 sections placées en soutien pourront avec les 30 outils du mulet et leurs 20 outils portatifs, faire travailler 16 à17 ateliers et obtenir environ 45 mètres de tranchée. — « Le profil de la tranchée-abri réglementaire est excellent, car il est éminemment offensif ; il se dissimule très bien soit dans les terres labourées, soit à l’aide de quelques broussailles et n’offre que très peu de prise à l’artillerie » (Travaux de campagne).

Les tranchées-abris sont fort utiles quand il importe de conserver et d’occuper à tout prix une portion découverte du champ de bataille ; quand on se porte en avant, elles servent aux troupes de deuxième ligne et aux réserves ; elles fournissent, en cas d’insuccès, un refuge où on se rallie pour arrêter les progrès de l’ennemi. Aux avant-postes, on s’en sert pour abriter les passages dangereux ou pour couvrir un petit poste. Dans l’exécution de ces tranchées, on profite autant que possible de la nuit, de la brume du matin, de la fumée du champ de bataille, d’une haie ou d’une ligne de broussailles, pour se cacher à l’ennemi.
Si le travail du pionnier paraît pénible, on se souviendra, avec le maréchal de Vauban, « qu’il faut avoir pour maxime d’user librement du travail des hommes, quand on a pour but la conservation de leur vie ». Mieux couverts, les hommes viseront mieux ; ils obtiendront le même résultat utile en éprouvant moins de pertes et en dépensant moins de cartouches…
Ce que le soldat romain faisait chaque soir, nos troupes devront le faire fréquemment. Comme les soldats américains, elles devront souvent se terrer avant de combattre.

261. — Critiques et observations auxquelles a donné lieu le profil de la tranchée réglementaire française. — 1° La largeur de la tranchée n’étant que de 1m10 au fond, les hommes n’y sont pas suffisamment à l’aise sur deux rangs et il n’y a pas assez de place pour les serre-files (général Faidherbe) ; les tracés perfectionnés indiqués ci-après permettent de remédier à cet Inconvénient.
2° « II résulte d’une série d’expériences faites à Anvers en 1871, que, dans la tranchée-abri française, la tête de l’homme qui s’assied sur la berme dépasse de 0m20 le sommet de la masse couvrante et qu’alors même qu’il appuie les coudes sur les genoux, en tenant la tête dans les mains, la partie supérieure de son sac est vue de loin » (général Brialmont). On remédiera à cet inconvénient soit en augmentant le relief, si l’on a le temps de renforcer la tranchée, soit en établissant sur le parapet, comme cela a lieu dans l’armée autrichienne, des Bonnettes en terre de 0m25 à 0m30 de hauteur. Remarquons toutefois que les bonnettes ne sont utilisables que dans les tranchées-abris destinées à être défendues par un seul rang de tireurs, car elles empêchent les hommes du 2e rang de tirer.
3° Préoccupés surtout des conditions de défilement, les Allemands suppriment la berme de façon à rapprocher davantage le défenseur de la masse couvrante. Cette manière de faire a, sur le champ de bataille, le grave inconvénient de rendre difficile le franchissement du parapet et par suite de paralyser l’offensive immédiate.

262. — TRANCHEE-ABRI PERFECTIONNÉE. — D’après l’instruction pratique concernant la fortification de compagne du 21 juin 1873, on peut, pour répondre aux objections faites, perfectionner les profils ordinaires de la tranchée-abri française, en approfondissant le déblai du côté du revers et en donnant au fond une pente régulière, de façon à rassembler les eaux de pluie dans la partie approfondie ; on peut aussi roidir le talus intérieur du parapet et tailler un gradin dans le revers, en se rapprochant du profil indiqué (fig. 14).

Quand on en a le temps, on peut encore renforcer à volonté les tranchées-abris en portant la largeur de l’excavation à 2 mètres et en donnant au parapet une épaisseur de 0m80 suffisante pour arrêter la mitraille et les éclats de projectiles. Quand les terres sont assez compactes, on peut en même temps recouper la berme et obtenir un dispositif pour tireurs debout, indiqué par la figure 15.
Ainsi quo nous l’avons dit déjà, la suppression de la berme a l’inconvénient de paralyser l’offensive.

263. — RETRANCHEMENT EXPÉDITIF RÉGLEMENTAIRE (Fig. 16). — Son tracé — Ce retranchement se compose d’un parapet ayant 1 mètre de relief, 1 mètre d’épaisseur à la crête et 3 mètres d’épaisseur à la base. Les terres sont prises dans 2 tranchées ouvertes simultanément en avant et en arrière du parapet. Ces tranchées ont 0m50 de profondeur, 2 mètres de largeur au haut et 1m50 de largeur au fond ; des bermes de 0m40 à 0m50 les séparent du remblai ; les talus intérieur et extérieur suivent la pente naturelle des terres.
Le tracé s’indique, comme pour la tranchée-abri, par 4 rainures à la pioche marquant les limites extrêmes des deux tranchées ; le nombre des travailleurs est égal, pour chaque tranchée, au tiers de l’effectif à couvrir ; il faut donc pour la construction totale un nombre de travailleurs égal aux deux tiers de l’effectif à couvrir. Dans chaque excavation le placement des travailleurs est fait comme pour la tranchée-abri : chaque atelier se compose d’un piocheur et de deux pelleteurs devant faire 3 mètres courants de déblai s’ils sont munis de gros outils et 2m10 seulement s’ils sont munis d’outils portatifs.
Temps nécessaire. — Une heure à une heure et demie pour des travailleurs d’infanterie ; trois quarts d’heure à une heure et demie au maximum pour des travailleurs du génie.
Avec les 435 gros outils de terrassiers d’un régiment, deux compagnies peuvent exécuter environ 215 mètres de ce retranchement expéditif en une heure.

264. — RETRANCHEMENT EXPÉDITIF AMÉLIORÉ. TRANCHÉE-ABRI CONTRE LE CANON (Fig. 17). —Le retranchement expéditif du profil réglementaire se construit rapidement ; il constitue un abri suffisant contre le tir d’artillerie ; mais, en raison même de sa symétrie, il a le grave inconvénient, en cas de retraite, de pouvoir être immédiatement utilisé par l’ennemi et retourné contre ceux qui l’ont élevé. — Cet inconvénient est capital et cependant les conditions mêmes du combat imposent l’emploi d’un retranchement de force moyenne plus solide que la tranchée-abri et susceptible, malgré son exécution rapide, de résister dans une certaine mesure à l’artillerie.
En effet, un intérêt tactique de premier ordre peut obliger à occuper, malgré tout, un point décisif du champ de bataille qui par sa situation attire tout particulièrement et l’attention de l’ennemi et les coups de son canon. Peut-être même a-t-on pu prévoir dès l’aube l’impossibilité où l’on sera de renforcer successivement, au cours de l’action, les troupes postées à ce point important, et s’est-on décidé, en conséquence, à y placer de suite des fractions d’infanterie à rangs serrés capables de le conserver à tout prix. Ces troupes ne tiendront pendant de longues heures sous le canon, que si le parapet qui les couvre est assez résistant.
Dans une situation pareille (situation dont les tranchées élevées sur l’éperon de la Montagne Rouge à la bataille de Spicheren nous offre un exemple), on peut, en deux heures de temps, obtenir un abri très efficace en donnant au retranchement, le profil indiqué par la figure 17.
Le relief du parapet sur le sol est de 0m80 ; son épaisseur est portée à 3 mètres, la tranchée a 1 mètre de profondeur ; un gradin large de 0m60, creusé à 0m50 au-dessus du fond de la tranchée et à 1m30 au-dessous de la crête sert de banquette ; les défenseurs sont défilés contre les coups qui rasent la crête sous l’inclinaison du sixième.

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2° Retranchements rapides.

265. — Les retranchements rapides sont exécutés à proximité de l’ennemi, mais dans des conditions où l’on dispose d’un certain temps et où les travailleurs jouissent encore d’une sécurité relative, par exemple, la veille ou le soir d’une affaire. Il est donc habituellement possible de donner à ces retranchements plus de relief et plus d’épaisseur, quoiqu’en principe leur exécution ne doive exiger que quelques heures. Les officiers du génie dirigent le travail ; ils ont à leur disposition les troupes de leur arme et des détachements de travailleurs d’infanterie ; l’abaissement du terre-plein permet de diminuer le relief du parapet et par suite d’abréger la durée du travail.

266. — TYPE N°4. RETRANCHEMENT RAPIDE RÉGLEMENTAIRE. (Décision ministérielle du 2 juillet 1874). — Dans le type réglementaire (fig. 18), le parapet a une épaisseur de 4 mètres, suffisante contre tous les coups de l’artillerie de campagne et une hauteur de 1m80 permettant de bien découvrir le terrain en avant. On emploie par mètre courant cinq travailleurs dont trois dans le fossé et deux dans la tranchée intérieure ; ces derniers doivent, autant que possible, disposer de deux pelles et d’une pioche.
Les défenseurs montent et se forment à l’aise sur la banquette, ils disposent en outre d’un terre-plein large et commode. Ce type a cependant le double inconvénient d’exiger, d’une part, un travail d’au moins trois heures pour des travailleurs du génie très exercés, de six à neuf heures pour des troupes d’infanterie et, d’autre part, de ne pas couvrir suffisamment les défenseurs contre les coups plongeants au quart.
Pour remédier aux inconvénients du profil réglementaire, on préconise à l’Ecole des travaux de campagne de Versailles les trois types suivants, qui assurent le défilement complet des défenseurs et permettent de gagner du temps.

267. — TYPE N°2. — Dans le type n°2 (fig. 49), on réduit l’épaisseur du parapet à 3 mètres et sa hauteur à 1m30. Les défenseurs sont bien défilés ; le fossé extérieur et la tranchée intérieure donnent le même déblai (1m800 par mètre courant) ; trois heures suffisent pour l’exécution avec des travailleurs d’infanterie placés à raison de 4 par mètre courant, dans la tranchée et 2 dans le fossé. Une épaisseur de 3 mètres de parapet sera presque toujours suffisante sur le champ de bataille ; l’existence d’une berme de 0m90 permet d’ailleurs d’épaissir ultérieurement le parapet si l’on en a le temps.

268. TYPE N°3. — Dans le type n°3 (fig. 20), le parapet a 1m30 également de hauteur et 4 mètres d’épaisseur ; le fossé est approfondi de 0m60. Construit dans les mêmes conditions que le type n°2, il exige quatre heures de travail.

269. — TYPE N°4 — Dans le type n°4, le parapet a comme dans le profil réglementaire 4 mètres d’épaisseur et une hauteur de 1m80, permettant de bien découvrir le terrain avoisinant. Tout en exigeant neuf heures de travail quand il est construit par des travailleurs d’infanterie, ce type est préférable au profil réglementaire parce qu’il couvre les défenseurs du terre-plein contre les coups plongeants au quart. On passe du type n°3 au type n°4, en donnant à la tranchée intérieure 3m20 de largeur au lieu de 2m40 ; au fossé, 3m50 de largeur au lieu de 3 mètres ; au parapet 1m80 de hauteur au lieu de 1m30.

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3° Retranchement progressif établi par des renforcements successifs

270. — Quand on connait le nombre d’heures dont on dispose pour l’exécution, on choisit parmi les divers types de retranchements celui qui, susceptible d’être construit dans le temps donné, satisfait le mieux aux exigences de la situation.
Quand au contraire, ce qui arrivera fréquemment, on ébauche en toute hâte un retranchement sans savoir si, l’instant d’après, les travailleurs ne seront pas surpris par l’attaque, il importe avant tout d’obtenir de suite un premier abri qui, bien que faible au début, soit susceptible d’être renforcé d’autant plus que l’ennemi tardera davantage à attaquer.
Cette manière de faire (fig. 21) donne lieu pratiquement à un travail exécuté en 4 périodes.

1re Période. — Tranchée abri réglementaire, représentée sur la fig. 21 par les portions marquées I. Résultat obtenu après 30 à 45 minutes. (Voir ci-dessus n°257 et fig. 12).
2e Période. — Renforcer la tranchée-abri d’après les indications données au n°264, fig. 17. Le profil marqué en I et II sur la figure 21 donne un abri suffisant contre l’artillerie et s’obtient après un travail d’une durée totale de trois heures. Si à ce moment l’ennemi est signalé, on enlève la banquette et on raidit le talus intérieur pour obtenir le profil de la fig. 17, les tireurs se tiennent sur le gradin du terre-plein transformé en banquette.
3e Période — Passer au retranchement rapide amélioré, du n°3 (n°267, fig. 19). Le profil marqué en I, II et III sur la figure 21 s’obtient après un travail d’une durée totale de six heures au plus.
4e Période. — Passer au retranchement rapide amélioré du type n°3 (n°268, fig. 20). Le profil définitif marqué en I, II, III et IV sur la figure 24 s’obtient après un travail d’une durée totale de sept heures et demi au plus ; il donne 1m30 de relief, 4 mètres d’épaisseur de parapet, 0m60 de berme, 2m40 de terre-plein défilé contre les coups plongeants au quart, un fossé de 3 mètres de largeur sur 1m60 de profondeur.
En procédant ainsi par profils successifs, on perd un peu de temps, mais on a le grand avantage d’être, pendant toute la durée du travail, prêt à recevoir l’ennemi.

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4° Retranchement donnant plusieurs étages de feu.

271. — La Revue militaire de l’étranger signale dans son n°408 l’emploi que les Turcs firent d’un retranchement de ce genre, dans certains des ouvrages qu’ils élevèrent à loisir autour de Plewna.

La position des trois lignes de feu est indiquée sur la fig. 22 : en A sur la banquette du parapet, en B sur une banquette établie au bord du talus d’escarpe pour recevoir, au moment de l’assaut, une ligne de tireurs primitivement abrités dans le fossé, en C dans un chemin couvert, creusé entre la contrescarpe et le glacis.

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